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Conférence d'introduction
« Les énergies vitales dans la perspective d’une archéologie du mental »
Colloque DDC, c/o CERAM, SA
23-24 NOVEMBRE 2001 |
A - Le mental : qu’est-ce à dire ?
- Voici le lieu, à la fois
- ontogénétique et phylogénétique, de l’accumulation de toutes les informations
- spéculativo-pratiques venant des expériences de survie traversées par tous les individus qui nous ont précédés dans l’histoire de la Terre ;
- les circonvolutions reptiliennes du cerveau ont emmagasiné toutes ces
- batteries d’auto-défense, en même temps que
- la mémoire physique de toutes les peurs et angoisses de vivre et de mourir, occasionnées par les destins parcourus : cette mémoire est physique, car elle a aussi pris forme dans le développement même des tissus et se traduit par des réactions souvent incontrôlables par le sujet. On peut en revanche les constater de l’extérieur.
- Quand je dis que ces informations sont d’ordre spéculativo-pratique, c’est pour insister sur le fait que
- certains savoir-faire (pratique) ne peuvent être encore verbalisés, parce qu’ils ont été somatiquement intégrés aux comportements acquis à l’insu du sujet;
- en revanche, ils conservent au niveau mental (spéculatif) la capacité d’être verbalisés, quand la capacité du sujet est sollicitée à un point tel, que ce sujet ne peut plus se soustraire à « dire » les choses et à les désigner : en inventant au besoin le mot, par la métaphore et son imaginaire.
Ou alors, il verse dans l’une des multiples formes de l’autisme.
- Et c’est à ce moment de la bascule que jouent ou ne jouent pas les forces vitales accumulées. Ici, il s’agit de distinguer entre les
- les forces venant du « phylè » ;
- les forces venant du génotype familial immédiat ;
- les forces venant de l’environnement éducationnel général, depuis la gestation et la prime enfance jusqu’au moment présent ;
- et celles qui sont le propre même, le génotype individuel du sujet.
- Le moment des forces va dépendre d‘un certain nombre de facteurs, dont les inconscients ne sont pas les moindres, et se trouvent justement mêlés à cet inconscient mental général dont chacun hérite avec la vie.
- Car l’homme ne cesse jamais d’appartenir à l’histoire génétique du « phylè » : beaucoup de nos initiatives et de nos réactions « spontanées » ont en fait à voir avec les « impressions », cad avec ce qui a été « imprimé » dans le disque dur du cerveau!
- L’observation de l’Histoire nous pose quand même quelques questions, qui relativisent toute théorisation. La phrase de Valéry : « Nous autres, civilisations, nous savons que nous sommes mortelles », nous renvoie aux réflexions de Fernand Braudel à propos de la montée, puis de la décadence de certaines manifestations culturelles dans l’ordre géopolitique comme dans l’ordre individuel
- Les royaumes khmers d’Angkor et de Phimaï ou le Portugal d’Henri II le Navigateur : pourquoi le génie qui en a fait des modèles obligés de réussite historique (indépendamment de nos appréciations éthiques) ne semble plus « fonctionner » : ce qui fait des nations correspondantes des entités « émergentes » dans la géopolitique planétaire !
- Qui n’a jamais constaté autour de lui des illustrations de ce qu’on nomme « le principe de Peter », qui théorise les degrés maximum de développement individuel : après quoi une stagnation fatale entraîne une irrésistible et lamentable décrépitude. Et ceci pas nécessairement chez des individus frappés par l’âge ou la maladie ! Pourquoi A.Rimbaud stoppe-t-il si tôt (à 19 ans) sa formidable veine poétique pour vivre de traffic et de contrebande dans la Corne de l’Afrique? Et Charles Quint, pourquoi, à seulement 56 ans, abdique-t-il soudain en 1556 (il est né avec le siècle) pour se retirer au monastère de Yuste en Estramadure, laissant le titre impérial à son frère Ferdinand 1er de Habsbourg, son fils Philippe II héritant de l’Espagne, de l’Itale, des Pays-Bas et de l’empire colonial ?
B - Une Archéologie du Mental (AdM) consisterait à établir chez l’individu
(mais ceci vaut pour les nations, mutatis mutandis)
- en se servant de l’anamnèse, l’inventaire explicite de l’acquis en matière d’expériences « positives & négatives » : développement de l’imaginaire par une activation de l’imagination (méditation, rêverie, songes, contes, musique…) ;
- le bilan de cet inventaire au temps « t » où se présente « le problème » : anamnèse conduite de façon ciblée dans des entretiens de type thérapeutique ;
- la capacité d’utiliser la meilleure parade, puisée dans le capital acquis et augmenté de sa plus value que lui confère sa conscientisation !
1 - Si et quand le client a déjà quasiment sombré dans l’autisme, cette AdM, en s’aidant de l’anamnèse, l’aide à régresser jusqu’à ce moment de son histoire personnelle où quelque chose pour une certaine raison s’est bloquée et a bloqué par là-même tous les circuits de communication entre les diverses fonctions de l’existence.
2 - L’AdM joue avec des images, et avec des mots porteurs d’images : c’est le « film » de la vie qui s’est cassé, on peut re-tourner certaines séquences, certaines scènes. Ces dernières ne supprimeront pas les premières : elles leur offriront seulement des alternatives qui les relativiseront, montrant par là leur importance limitée.
3 - En montrant au client qu’ « il » est plusieurs, et que d’autres possibles lui-mêmes sont encore en attente de réalisation dans l’espace et le temps, AdM & Psychanalyse concourent à démultiplier chez lui les espérances virtuelles nécessaires à prétendre à un avenir autre !
C - L’APPROCHE PROPHYLACTIQUE
Il serait souhaitable bien entendu de pouvoir prévenir ces situations : autrement dit d’être actif et non pas seulement ré-actif.
- Dire que l’enfant doit être le produit de l’amour de la part des êtres qui le « mettent au monde », semble relever de la sensiblerie, et pourtant, c’est bien là « l’origine du début du commencement ».
- La toute petite enfance demeure, tout comme la gestation, des lieux dans lesquels le rôle de la mère est prépondérant, voire tout-puissant (ou peu puissant, ou im- puissant) : l’enfant ne se remettra jamais entièrement de ce qui s’est ou ne s’est pas passé, dans ce temps qui échappe presque entièrement à sa réappropriation par le sujet (au-delà du Cri Primal d’Arthur Janov, et du « çà » de Groddeck).
- La première socialisation, l’école dite maternelle, peut être considérée comme l’étape suivante où des chances peuvent de nouveau être à disposition : la rencontre avec la 1ère maîtresse/ le 1er maître peut effectivement être de lieu d’une condensation des énergies positives, dont la personne chargée d’une autorité bienveillante devient le catalyseur !
- L’étape suivante sera la puberté. Qui dira jamais assez combien cette étape peut être délicate, autant pour le garçon que pour la fille, et peut-être plus ancre pour le garçon dont la sexualité doit s’affirmer en termes de « virilité » auprès de ses camarades. Les autismes pubertaires ne sont pas parmi les plus faciles à « ouvrir ».
- Ma double fonction de prêtre et de psy me fait rencontrer, à l’occasion des préparations au matriage, des situations très complexes, où se mêlent encore les indigestions d’une éducation religieuse mal digérée, au point que les angoisses touchant le permis-défendu et l’obsession du pêché font de cette démarche un chemin de croix plutôt que de roses !
Comment, partout dans ces situations, prévenir plutôt que d’avoir à guérir ?
Où puiser les énergies positives nécessaires à imaginer le monde comme pouvant être autre, et les résistances comme servant à révéler des capacités inconnues et nouvelles.
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